Le journal de papageno

Un seul exemple: il y a quelques années, pour mon propre usage, j'arrange la magnifique Sonate en La majeur de César Franck pour alto et piano. Une transcription assez naturelle lorsqu'on sait que Franck avait autorisé une version pour violoncelle et piano (dont Jacqueline Du Pré a gravé une magnifique version au disque). Une autre transcription existait dans le commerce mais je la trouvais tout sauf satisfaisante: réalisée par un aliste et non par un compositeur, elle reposait sur des choix plutôt illogiques musicalement. Je publie donc sur ScoreExchange ma version de la sonate en La majeur de Franck pour alto et piano. 

Quelque temps plus tard, je réalise pour un ami une autre version pour clarinette et piano de la même Sonate. Bien que l'ambitus de la clarinette en La soit quasiment identique à celui de l'alto, la version pour clarinette est assez différente: les accords sur 3 et 4 codes du mouvement lent sont remplacés par des arpèges rapides (une figure dans laquelle la clarinette excelle), et certains passages qui sonnent assez bien dans le registre grave de l'alto sont joués une octave plus haut car le registre du chalumeau de la clarinette n'est pas assez puissant pour les faire sonner au-dessus d'un accompagnement pianistique passablement chargé.

Quelques années passent. Et puis en jetant un coup d'oeil aux statistiques, je me rend compte que des internautes peu nombreux mais situés partout dans le monde ont téléchargé et sans doute joué ces arrangements. L'un d'entre, un Coréen du nom d'Atticus Park, m'a envoyé une vidéo de son examen au Conservatoire où il jouait cette sonate. Ça sonne plutôt bien ma foi, on ne voit pas les coutures, danss le sens où l'on pourrait facilement croire que c'est écrit à l'origine pour clarinette.

La musique, ou l'art de se faire des amis en Corée sans jamais y avoir mis les pieds.