Ils sont fous ces japonais

En décembre dernier, Toyota a fait sensation avec la démonstration d'un robot qui joue du violon:

(l'archet est un peu rigide et le vibrato n'est pas terrible, je préfère tout de même Hilary Hahn !)

Vu également, un robot trompettiste qui se balance sur ses deux pieds:

En fait le but des ingénieurs de Toyota n'est pas de concurrencer le New Japan Philarmonic orchestra, mais plutôt de concevoir des robots qui assisteraient par exemple les personnes âgées à domicile. La précision et la coordination des mouvements nécessaire pour jouer du violon (même de façon assez médiocre) constitue à la fois un test pour les ingénieurs et une démo très glamour dans les show d'électronique grand public. Notons que le robot n'est muni d'aucun système auditif et se trouve dont parfaitement sourd de naissance. Sur ITworld l'auteur d'un article qualifie le son de "parfait" (il doit être sourd lui aussi) et compare ses mensurations (un mètre cinquante et 56 kilos) à celles de la Japonaise moyenne, ce qui n'est vraiment pas gentil.

Plus récemment encore, Honda a présenté un robot chef d'orchestre dirigeant des musiciens du philharmonique de Detroit, qui n'a de chef d'orchestre que le nom: n'étant pas muni d'oreilles il bat la mesure selon un programme pré-enregistré, ce qui en fait une variante à peine améliorée du métronome de Maelzel:

Vu enfin sur le Net: d'autres robots musiciens, pianistes, guitaristes. Aucun ingénieur ne semble pour l'instant assez fou pour tenter un robot qui jouerait de l'alto. Il faudrait pour ça que l'intelligence artificielle devienne assez sophistiquée pour comprendre les blagues d'altistes...

Commentaires

1. Le vendredi 16 mai 2008, 14:37 par klari

c'est vrai qu'il est dommage que la presse ( et moi aussi, d'ailleurs) ait fait des choux gras de l'aspect anecdotique du robot qui joue du violon /dirige un orchestre.

Pour info, la Cité des Sciences propose un concert dirigé par un robot (juste un bras articulé, c'est moins sexy) demain soir dans le cadre de la nuit des musées.
( www.cite-sciences.fr/fran... )

2. Le vendredi 16 mai 2008, 14:38 par klari

... au lieu d'insister sur l'aspect humain (oups!) du projet.

3. Le samedi 17 mai 2008, 14:20 par Papageno

Cette idée de robot chef d'orchestre est parfaitement stupide et si on m'avait proposé de participer à un tel concert, j'aurais sèchement refusé. En effet le robot en question n'a pas d'oreilles ! C'est une mécanique qui reproduit les mouvements d'un (vrai) chef d'orchestre. En bref, il est à peine plus élaboré que le métronome de Maezel de 1820.

Mais les interprètes sont parfaitement capables de jouer en mesure sans métronome et sans chef. A quoi sert un chef alors ? précisément à interagir avec les musiciens et avec le public (ainsi qu'avec les chanteurs ou les solistes le cas échéant). Un chef sert à introduire une part d'improvisation et de surprise, mais aussi à imprimer une direction d'ensemble. Grâce à une analyse détaillée de la partition, le chef la connaît en général mieux que tous les musiciens de l'orchestre, et il sert également d'intermédiaire entre le compositeur et les musiciens.

En bref, croire qu'on peut faire un chef d'orchestre sans oreilles, c'est se fourrer la baguette dans l'œil, et bien profond encore. Mais le pire est que je suis persuadé qu'il y aura des gogos pour regarder cette `performance' avec la bave au lèvre et applaudir comme des automates à la fin. Les vrais robots seront sans doute dans le public...

4. Le samedi 17 mai 2008, 16:37 par Eric

La dextérité de ces robots est assez bluffante et remarquable. Bravo aux ingénieurs qui ont réalisé ces prouesses scientifiques et techniques.
Un ami biomécanicien travaille sur des plate-formes robotiques anthropomorphiques pour assister des personnes handicapées. Je confirme que ses modélisations mathématiques et ses animations informatiques sont beaucoup moins sexy (même d'un chef d'orchestre monobras et cul-de-jatte) mais elles n'en sont pas moins intéressantes.
Une fois de plus, le message des services de communication et de marketing des grosses sociétés vient « polluer » les travaux de recherche et leurs applications. Si les gens qui les composent avaient un ego un peu moins surdimensionné, s'ils s'intéressaient vraiment aux produits dont ils parlent et s'ils prenaient un peu moins les gens pour des imbéciles, le discours gagnerait en clarté. Cela fait que même ces réalisations prodigieuses et aux débouchés extraordinaires finissent par porter le flanc à vos critiques. Vous avez raison de les formuler mais il faut qu'elles visent juste. Entre parenthèse, j'ai essayé une fois d'émettre un son avec une trompette, je n'y suis jamais arrivé et le robot violoniste joue bien mieux que moi le bougre.
Je rebondis également sur la remarque de Klari. Pourquoi certains journalistes (trop nombreux à mon goût) reprennent-ils de manière aussi directe et sans vraiment l'analyse et le recul nécessaire les dossiers de presse pré-mâchés, institutionnels voire lénifiants des entreprises ? Pourquoi se tirent-ils une balle dans le pied en rendant ainsi leur article sans réelle valeur ajoutée ?

5. Le samedi 17 mai 2008, 17:18 par Eric

On ne porte pas le flanc mais... on prête le flanc à la critique. J'ai assez à porter le fardeau de ma sottise.

6. Le samedi 17 mai 2008, 18:42 par Papageno

Mais une démo dans un show d'électronique se doit d'être sexy ! Le robot qui joue du violon pour Toyota, c'est comme l'ordinateur qui bat Kasparov aux échecs pour IBM: à la fois un défi technologique et une vitrine marketing. Le robot qui peint des carrosseries de voiture ou qui aide mamie à se lever pour aller aux toilettes, c'est tout de même moins glamour !

Donc, je salue la performance des chercheurs et ingénieurs qui ont mis ces robots au point. Et je n'ai pas l'impression que le marketing grand public ait pour effet de diminuer leurs mérites. Même si ces robots se contentent d'exécuter une séquence de mouvements enregistrés et ne peuvent pas vraiment interagir avec leur environnement.

Quant aux journalistes... dans le monde de spécialistes et d'experts où nous vivons, ne sont-ils pas condamnées à parler le plus souvent de sujets qu'ils ne maîtrisent pas ?