La complainte du Roi Henri
Par Patrick Loiseleur le dimanche 3 février 2008, 23:50 - Compositions - Lien permanent
J'ai posté ce soir sur La Flûte Enchantée Tamino Productions la partition d'une mélodie pour baryton et piano, ainsi que la même mélodie dans un arrangement pour Baryton, Hautbois, Harpe et Quatuor à cordes.
Le titre: Complainte du roi Henri de France est celui d'un poème de Philippe Desportes, et le roi est Henri III de France (1551-1589), dont le règne fut marqué par des guerres civiles et des guerres de religion entre protestants et catholiques. A la fin de sa vie le roi manifestait un goût prononcé pour le macabre, l'expiation des péchés, le malheur et la mort. Ce très beau texte exprime donc un deuil absolu, qui refuse toute consolation:
Lieux de moi tant aimés, si doux à ma naissance,
Rochers, qui des saisons dédaignez l'inconstance,
Francs de tout changement,
Effroyables déserts, et vous, bois solitaires,
Pour la dernière fois soyez les secrétaires
De mon deuil véhément.
J'ai le coeur si comblé d'amertume et d'oppresse
Que par contagion, je rends plein de tristesse
Ceux qui parlent à moi ;
Et qui pense adoucir le regret qui m'entraîne
Sent en me consolant couler dedans son âme
La tristesse et l'émoi.De tous plaisants discours mon courage s'offense,
Un mal tel que le mien étant sans espérance
Est aussi sans confort.
Ce qui sonne le plus à mes tristes oreilles
Ce sont cris de hiboux, d'importunes corneilles
Et d'oiseaux de la mort.
J'ai donc cherché des sonorités acides, dissonantes, pesantes dans cette pièce. L'immuabilité du sentiment de deuil est rendue par des harmonies sont entièrement statiques, tandis que les nuances, les registres, les timbres sont utilisés pour moduler ce sentiment. J'espère pouvoir poster bientôt dans ce journal un enregistrement.
Je fouille en ce moment les anthologies et les vieilles éditions à la recherche de textes du XVIè siècle (Louise Labé, Clément Marot, Pierre Marbeuf et les autres). On y trouve une liberté, une force d'expression, une façon de parler de la vie, de la mort, de la passion, de l'amour sans équivalent dans la littérature des siècles suivants (le XXè excepté). S'il y a des textes de cette période qui vous plaisent particulièrement, n'hésitez pas à me les envoyer, il n'y a pas moyen de me faire davantage plaisir en ce moment !